Sommet de Paris pour un nouveau pacte financier: quelles retombées pour nos pays ? (Par Idrissa Cherif)
Invité en France à l’occasion du Sommet pour un Nouveau Pacte financier mondial, tenu à Paris du juin 2023, j’ai pu me rendre compte à quel point les préoccupations en matière d’environnement occupent une place essentielle dans la marche du monde. En tant que leader de parti, l’UCG, de Guinéen profondément soucieux du péril écologique et de l’impérieuse nécessité d’y trouver les solutions appropriées, nous avons particulièrement apprécié les recommandations issues de cette importante rencontre.
Quels enjeux pour le continent africain ? Quels enseignements en tirer pour créer les conditions d’un réel décollage de nos économies à travers le recours aux énergies propres et aux financements en faveur de nos finances publiques et en direction du secteur privé ?
Il faut dire d’abord que la feuille de route élaborée pour la mise en œuvre des engagements du Sommet pour un Nouveau Pacte financier mondial permet, d’emblée, de tirer des conclusions fort utiles. Les participants aux travaux, soit plus de 180 représentants de 32 pays et organisations régionales, dont plusieurs chefs d’Etat et de gouvernement d’Afrique, une trentaine d’organisations internationales et institutions financières, ainsi que 54 représentants de la société civile, dont des organisations non gouvernementales et des entreprises, ont partagé leur analyse des défis mondiaux actuels.
Différents formats de dialogue ont eu lieu, en particulier au cours d’une quarantaine de réunions des quatre groupes de travail thématiques et du groupe formé de 13 économistes du One Planet Lab. Pour avoir participé à des rencontres Be to Be et à des panels forts instructifs, j’ai particulièrement apprécié le ton et la sincérité des intervenants lors des panels. Il ne s’agissait pas, comme il est souvent reproché aux grandes puissances d’imposer leurs vues et aux autres pays de suivre la voie. Non ! C’était plutôt un débat interactif, chaleureux, dur par moment pour certaines questions soulevant des approches différentes, mais toujours conviviales et surtout fondées sur des propositions concrètes.
Il en est ainsi de la décision prise par les partenaires du G20, pour la prochaine réunion des ministres des Finances et des gouverneurs des banques centrales, les 15 et16 juillet 2023, de donner un nouvel élan au programme d’examen du Cadre d’adéquation des fonds propres, dans le prolongement de la feuille de route du G20 relative à la mise en œuvre de ce cadre. Il s’agit, dans ce cadre, de prendre des mesures à court et à moyen terme afin d’optimiser l’utilisation des capitaux par les banques multilatérales de développement (BMD) et les encourager à adopter de nouvelles mesures innovantes.
Il en est de même pour les bailleurs de fonds (pays, banques de développement nationales, régionales et multilatérales, organisations philanthropiques, secteur prive et autres institutions) qui devraient annoncer, d’ici le Sommet africain sur l’action climatique, prévu début septembre 2023, un soutien additionnel à la préparation de projets (en phase initiale) dans le cadre de l’Alliance pour des infrastructures vertes en Afrique de la BAD, récemment créée, et du Mécanisme mondial de financement des infrastructures de la Banque mondiale.
En tout état de cause, j’ai exprimé mon adhésion totale à l’invite faite aux bailleurs de fonds de contribuer aux efforts pour garantir un niveau adéquat de ressources concessionnelles pour les opérations de développement. Ces partenaires au développement doivent, en effet, s’engager de nouveau, notamment dans le cadre du programme de mobilisation du Fonds africain de développement et des subventions, afin d’atteindre les objectifs de réduction de la pauvreté et pour la croissance durable de nos économies.
Comment ne pas applaudir la réflexion menée sur les possibilités innovantes de financement, afin de soutenir les pays en développement particulièrement vulnérables aux effets néfastes des changements climatiques, comme les nôtres, et pour remédier aux pertes et préjudices causes par les conséquences négatives des changements climatiques ?
Lors des échanges avec des experts et hommes d’affaires, il est clairement apparu que, pour atténuer les vulnérabilités, les décisions de financement doivent reposer sur des critères tenant pleinement compte de toutes les conséquences des changements climatiques et des menaces pour la biodiversité, ainsi que de la surexposition et de la vulnérabilité de certains pays à ces problématiques. C’est ainsi que la probabilité de parvenir à un engagement de 100 milliards de dollars pour financer l’action climatique en 2023 a été vivement saluée, par tous les participants, et devrait encore être étayée par la confirmation des chiffres fournis par les contributeurs et annoncés par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).
Plus que jamais, la solidarité internationale et les transferts des pays les plus riches vers les pays les plus vulnérables sont essentiels pour forger un monde plus juste. Une nouvelle méthode de comptabilisation tenant compte des efforts déployés pour mobiliser les financements privés peut contribuer grandement à augmenter ces contributions et à les pointer dans la bonne direction. Cela s’inscrit dans un appel mondial à une évolution vers des investissements solidaires.
Une coalition de 16 organisations philanthropiques a exprimé le souhait de renforcer encore les synergies entre les financements publics et les organisations philanthropiques privées pour mobiliser des investissements, fournir un soutien stratégique concernant les priorités liées aux ODD et débloquer de nouveaux investissements afin de financer l’action climatique dans les pays à revenu faible et intermédiaire, tout en demeurant pleinement déterminés à réduire la pauvreté et les inégalités. C’est une opportunité à saisir pour nos pays.
Egalement, lors du Sommet, la Société financière internationale, la France et la Banque européenne pour la reconstruction et le développement, ont promis un appui supplémentaire à l’Alliance pour l’entrepreneuriat en Afrique. Il faut s’en réjouir et mettre en place un cadre idéal pour capter de tels financements et initier des projets utiles pour les populations.
Ainsi, la mise en place, par les banques multilatérales de développement, de processus simplifiés et accélérés d’approbation des financements pour les petits projets du secteur privé dans les pays à faible revenu, comme la Guinée, a été identifiée comme un moyen possible d’améliorer et de faciliter l’accès aux financements nécessaires.
Je reste convaincu, comme l’a fait ressortir le rapport issu des travaux, que seule la mise en place de stratégies nationales pour soutenir le développement du secteur privé dans les politiques publiques et de planification du développement des pays à revenu faible et intermédiaire, constitue un accélérateur et un facilitateur de l’accès aux financements.
Par Idriss Chérif
Président de l’UCG