Procédure disciplinaire à l’encontre des magistrats : il faut distinguer les attributions du ministre de la justice et celles du CSM (Me Traoré)

Procédure disciplinaire à l’encontre des magistrats : il faut distinguer les attributions du ministre de la justice et celles du CSM (Me Traoré)

Dans la procédure disciplinaire concernant les magistrats, il est nécessaire de faire la distinction entre les attributions du ministre de la Justice et celles du Conseil supérieur de la magistrature.

Selon l’article 38 du Statut des magistrats, le Ministre de la Justice, Garde des Sceaux, saisi d’une plainte ou informé d’un fait de nature à entraîner une sanction disciplinaire contre un magistrat, après vérification, met en mouvement l’action disciplinaire en saisissant le Conseil Supérieur de la Magistrature.
Le Ministre de la Justice, Garde des Sceaux, peut suspendre par arrêté la magistrat mis en cause pour une durée qui ne peut excéder trente (30) jours.
Plus loin, le même texte indique que le Conseil Supérieur de la Magistrature doit être saisi dans les trente jours. Passé ce délai, le magistrat concerné reprend d’office ses fonctions.
Ainsi, le Garde des Sceaux :
– Met en mouvement l’action disciplinaire contre un magistrat en saisissant le Conseil Supérieur de la Magistrature.
– Peut suspendre un magistrat pour une durée de 30 jours maximum.
La suspension décidée par le Ministre de la Justice, n’est pas une sanction disciplinaire. Il s’agit tout simplement d’une mesure par laquelle le Ministre de la Justice interdit provisoirement au magistrat d’exercer ses fonctions en raison d’une faute qu’il aurait commise.
Le seul organe qui a le pouvoir de sanctionner un magistrat sur le plan disciplinaire est le Conseil Supérieur de la Magistrature qui est une juridiction des pairs. Et les sanctions qu’il peut infliger à un magistrat reconnu coupable d’une faute disciplinaire, telle que définie par l’article 35 sont:
-l’avertissement;
-le blâme
-le déplacement d’office ;
– la suspension avec ou sans perte de traitement ;
-Le retrait de certaines fonctions ;
-la radiation du tableau d’avancement ;
-le rabaissement d’un ou de plusieurs échelons ;
– la rétrogradation ;
-la mise à la retraite d’office avec ou sans perte de pension ;
-la révocation ;
Il ne faut pas confondre la suspension, en tant que mesure provisoire ou conservatoire, que peut prononcer le Ministre de la Justice sur le fondement de l’article 38 du Statut des magistrats et la suspension en tant que sanction disciplinaire que seul le Conseil Supérieur de la Magistrature peut prendre.
Quand le Ministre de la Justice suspend un magistrat et saisit parallèlement le Conseil Supérieur de la Magistrature, rien ne lui interdit de lever cette suspension avant l’issue de la procédure disciplinaire c’est-à-dire la décision du Conseil. Ce qu’il ne peut pas faire, c’est d’arrêter la procédure disciplinaire une fois que le Conseil Supérieur de la Magistrature a été saisi.
Étant entendu que la suspension, comme mesure provisoire prise par le Ministre, est une faculté, ce dernier peut valablement lever cette mesure avant la décision du Conseil Supérieur. Il n’y a donc aucune violation de la loi quand l’auteur de la suspension prend un acte pour rapporter la mesure.
La suspension, comme mesure provisoire, est prévue aussi par le Statut Général des Agents de l’État en ses articles 73 à 77. Ce qui ressort de ces dispositions, c’est qu’il s’agit d’une mesure provisoire à caractère essentiellement conservatoire comme le dit le législateur lui-même. En ce qui concerne la durée de la mesure, elle est de trois mois maximum alors qu’elle est de trente jours aux termes du Statut spécial des magistrats.
Le droit est fait d’une bonne part de logique.
Me Mohamed Traoré
Ancien Bâtonnier

 

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L'Equipe de la Rédaction