L’ancien locataire républicain de la Maison Blanche (2017-2021), un magnat qui a bouleversé la démocratie de la première puissance mondiale et ambitionne d’être réélu en novembre face au démocrate Joe Biden, a fustigé un jugement « totalement bidon » contre lequel il va « faire appel ».

Dans un document judiciaire de 92 pages, le juge Arthur Engoron de la cour suprême de l’Etat de New York l’a privé de la gestion de « toute entreprise ou entité juridique à New York pour une période de trois ans » et l’a condamné à payer 354,86 millions de dollars d’amendes.

La procureure générale de cet Etat, Letitia James, avait porté plainte contre Donald Trump en octobre 2022 et l’a contraint, avec ses deux fils adultes Donald Jr et Eric et leur groupe familial Trump Organization, à un procès civil pour fraudes, d’octobre à janvier.

La plus haute magistrate de l’Etat new-yorkais, élue du Parti démocrate, réclamait 370 millions de dollars de dédommagement.

Elle a salué vendredi « une immense victoire pour cet Etat et ce pays ».

– « Opposant politique » –

Depuis sa résidence Mar-a-Lago en Floride, Donald Trump a rétorqué qu’il allait « faire appel » car « il n’y a pas eu de fraude » mais « une instrumentalisation envers un opposant politique ».

Sur son réseau Truth Social, l’archifavori des primaires républicaines pour la présidentielle du 5 novembre a une nouvelle fois dénoncé une « ingérence électorale » et accusé le juge Engoron d’être « véreux » et la procureure générale « totalement corrompue ».

Mais un appel en justice ne dispensera pas automatiquement l’homme d’affaires et tribun politique de devoir verser immédiatement les 355 millions de dollars d’amendes, prévient Brian Quinn, professeur de droit au Boston College.

Son avocate au procès, Alina Habba, avait auparavant brocardé sur X une « persécution incessante » et une « chasse aux sorcières politique » destinées à l’ »abattre ».

– Actifs gonflés –

Trump père et fils ont comparu plusieurs fois lors de ce procès civil fleuve, dans un climat politique tendu.

Ils étaient accusés d’avoir fait enfler de manière colossale durant les années 2010 la valeur des actifs de la Trump Organization, leurs gratte-ciel, hôtels de luxe ou golfs dans le monde entier, pour obtenir des prêts plus favorables de banques et de meilleures conditions d’assurance.

Avant même le procès, le juge Engoron, avec qui Donald Trump a des relations exécrables, avait estimé fin septembre dans une ordonnance choc que la fraude était constituée.

Le magistrat avait tranché: le parquet général de New York avait présenté lors de l’enquête « des preuves concluantes qu’entre 2014 et 2021, les prévenus (avaient) surévalué les actifs » du groupe de « 812 millions à 2,2 milliards de dollars » selon les années.

En conséquence de « fraudes répétées », le juge Engoron avait alors déjà ordonné la liquidation des sociétés gérant par exemple la Trump Tower de la 5e Avenue de Manhattan ou le gratte-ciel de style néo-gothique et bientôt centenaire du 40 Wall Street.

Une décision qui avait été toutefois suspendue en appel.

Ces immeubles sont emblématiques de la réussite de Donald Trump, 77 ans, qui s’était lancé en 2015 dans la campagne présidentielle sur une image d’homme d’affaires et de bâtisseur à succès.

– « Pathologique » –

Le juge Engoron a également souligné vendredi que le montant des amendes contre Donald Trump et ses fils (quelque quatre millions de dollars chaque pour Donald Jr et Eric Trump) était justifié par leur comportement durant le procès.

« Leur manque total de contrition et de remords confine au pathologique », écrit le magistrat dans son ordonnance au vitriol.

« Ils sont simplement accusés d’avoir gonflé la valeur de leurs actifs pour faire plus d’argent (…) Donald Trump n’est pas Bernard Madoff. Pour autant, les accusés sont incapables de reconnaître leurs erreurs », a jugé Arthur Engoron.

Durant le procès, dans le prétoire, dans les couloirs du palais de justice de Manhattan et sur les estrades des meetings de campagne, Donald Trump n’avait cessé de tempêter contre une justice aux mains selon lui des démocrates du président Biden, dénonçant « un procès digne d’une république bananière ».

Contrairement à ses procès pénaux prévus cette année — comme celui fixé jeudi au 25 mars pour des paiements visant à faire taire une star de films pornographiques — Donald Trump et ses fils ne risquaient pas la prison dans cette affaire civile.

AFP